J'apporte ma petite réponse personnelle à cette réflexion.
Quand je pars en voyage, j'ai vraiment très peu de photo avec du monde dessus. Avec ma compagne, nous sommes parti, pour de la rando et les beaux paysages, en Bretagne, dans les Alpes, les Pyrénées, en Crête, au Québec, à Madère et nous partons en Corse dans quelques jours. Et si je reprends toutes les photos que j'ai faites jusque là, celles où nous apparaissons tous les 2 se comptent sur les doigts d'une seule main. Et celle où j'y fait apparaitre ma moitié sont un peu plus nombreuses, mais jamais à prendre la pose avec un "panorama" derrière. Uniquement des clichés pris sur le vif, capturer un moment, une expression, ou l'inclure dans un décor, un mouvement.
Alors oui, surement que les photos que je fais ont été faites par des centaines d'autres personnes avant moi. Et alors ? Je ne suis pas un adepte des réseaux sociaux, je n'ai pas de compte face de bouc ou sur l'oiseau bleu. Google n'est pas mon ami. Je me fiche royalement de ce que font les autres, je vis MA vie. Je fais donc MES photos. Mes souvenirs. MON regard. Et s'il y a bien une chose qui ne changera jamais dans ma pratique photographique, peu importe le matériel, peu importe mon expérience, c'est de vouloir capturer "ce" moment, celui que j'ai devant les yeux, celui qui me fait dire : "j'y étais".
Ces photos sont avant tout pour moi. Ca peut paraître égoïste, mais c'est après tout ma pratique. Et ensuite pour montrer à mes proches. Je n'ai pas vocation à faire des expositions, mais c'est évidemment l'étape d'après.
Un exemple : j'ai à côté de moi un calendrier photo. Sur celle du mois d'avril, on y voit une Pusada, une maison traditionnelle de Madère. Pour moi, cette photo a une âme, la mienne. Quand je la regarde, je me rappelle ce moment. La température, la fatigue de la journée de marche. Ma douce et tendre quelques mètre plus loin. C'est instant qui est passé, que j'ai apprécié. Si je vous la montre, vous allez y voir une Pusada, un ciel un peu cramé et quelques jolies plantes. Si ma photo est réussi, peut-être arriverez-vous à "sentir" un peu ce moment.
Si je tape (dans) Google : pusada, je verrais des photos de ces jolies maisons. Peut-être même celle que j'ai prise, voire avec un cadrage identique. Mais je suis certain qu'elle n'aura pas "l'ambiance" de MA photo, qu'elle ne me procurera pas les mêmes sensations. Parce qu'à ce moment, je n'y étais pas. Quand j'ai regardé à travers le viseur de mon appareil, si.
Et quand ma copine regarde cette photo, je sais qu'elle la "voit" à peu près comme moi. Qu'elle "sent" elle aussi la chaleur du moment, les courbatures dans les cuisses, le vent et le parfum des plantes. A sa manière, elle se rappelle de cet instant, au-delà de cette image.
C'est vraiment quelque chose qui va au-delà de l'image elle-même : que la composition soit réussie ou ratée, que l'image pique ou pas, au-delà d'un ciel cramé, d'un flou de bougé ou d'une montée en iso mal maitrisée. Bien sûr, je sélectionne les plus réussies, les plus jolies pour les imprimer, en faire des livres photo, des calendriers, des agrandissements. Parce qu'elles sont plus agréables à regarder quand je les montre à mes proches ou pour embellir mon appartement. Mais c'est le moment que je retiens, c'est instant de vie que j'ai voulu immortaliser.
Alors je continuerai à faire ainsi. Dans quelques jours, je prendrai des photos de paysages de la Corse. Des photos que des centaines d'autres auront fait avant moi et certains moments que je serai le seul à capturer "sur l'instant". Mais quand j'ouvrirai l'album photo, je me souviendrai ...