Bonjour
Physique et chimie photographique est un ouvrage indispensable, hors de prix mais c'est plus pour la partie "histoire" de la bibliothèque du photographe. Franchement, quand on voit aujourd'hui avec quelle facilité on peut sortir une épreuve papier format A4 voire plus grand, ça ne donne pas envie de ressortir l'agrandisseur, les cuvettes et tout ce qui va avec (mais franchement, je ne connais pas plus magique que l'appartion de l'image dans la cuvette de révélateur).
Pour la technique de mesure de l'exposition, une lecture du §622 et un coup d'oeil à la figure 584 de la page 701 de l'édition de 1976 monte le chemin parcouru en un peu plus de 35 ans…
Il ne faut jamais oublier que l'on ne peut juger de la pertinence d'une technique, aussi réputée soit elle, qu'en fonction des outils et de la technologie existants au moment de la mise au point de cette technique.
Pour revenir à la question de départ, historiquement, les fabricants d'appareil photo ont choisi de calibrer les cellules de leurs appareils sur des cartons gris dont le coefficient de réflexion est compris entre 15 % et 20 %. Le carton gris 18 % n'est pas une valeur magique mais seulement une valeur moyenne entre les deux extrêmes (la charte 12 plages Agfa d'antant comportait des plages bleu / vert / rouge / jaune / magenta / cyan et des plages "grises" à 80 % (D=0,10), 40 %, 20 % (D=0,70), 10 % (D=1,00), 5 % et 2,5 % (D=1,60)… et avait une dynamique insuffisante)
Le coefficient de calibration k dont il est question plus haut n'est que la retranscription photométrique de la chose avec la forme 2^EV=A²/T=LS/k (avec EV exposure value, A ouverture, T temps d'exposition, L luminance du sujet, S sensibilité et k coefficient dont la valeur varie suivant les fabricants entre 11 et 14 avec une valeur moyenne à 12,5).
Chez Nikon, le réglage standard du boitier est une sous-exposition systématique de l'ordre du 1/3 de diaph (ce qui permet des diapos plus saturées et moins de risque d'images cramées, pas de problème en négatif puisque la sensibilité annoncée est sous-estimée d'au moins un diaph).
Il est illusoire de vouloir contrôler l'exactitude de la cellule d'un APN avec un carton gris et une cellule à main :
- l'exposition calculée par l'APN intègre les corrections de transmission photométriques de l'objectif (il y a deux manières essentielles de graduer une échelle de diaphragme : l'ouverture géométrique (qui sert au calcul de la profondeur de champ) et l'ouverture photométrique (pour la mesure de l'exposition) - les objectifs cinéma portent les deux échelles - et chaque lentille cause une perte infime de lumière qui devient significative sur des objectifs qui comptent au minimum 9 lentilles) et du tirage de l'appareil (le coefficient de prolongation de l'exposition est égal à (1+G)² avec G grossissement de l'image) ainsi que les effets type D-lighting.
- une mesure par cellule à main doit toujours être interprétée et a, au mieux, une précision de l'ordre de ± 1/3 de diaph avec une bonne cellule
- un APN décent a ajourd'hui un affichage de l'histogramme de l'image. C'est bien mieux comme contrôle de l'exposition qu'un carton gris et qu'une cellule à main…
- enfin, le carton gris, c'est comme les ouvrages de technique photo : c'est pas parce qu'il n'y a pas de date de péremption que ça ne s'use pas (même quand on ne s'en sert pas).
La méthode qui consistait à caller l'exposition en photographiant un carton gris à été abandonnée il y a bien longtemps (même si elle est encore donnée comme recette magique - on me l'a même fait au boulot) :
- le carton gris 18 % a une densité de 0,75. En tirage papier argentique (la méthode magique consitait à mesurer au densitomètre le carton gris pour déterminer les corrections de filtrage sur la tireuse ou l'agrandisseur), c'est une zone de densité où le rendu n'est pas encore linéaire (il vaut mieux une densité de l'ordre de 1,00) et en impression jet d'encre (et en film instantané), il vaut mieux une densité autour de 0,60 pour juger de la neutralité d'une image… sans parler, que le rendu optimal dépend de l'endroit où on vit (certaines régions supportent le magenta et/ou les tirages au rendu plus froid alors que dans d'autres, on aime le vert et/ou les couleurs chaudes), de l'âge (les vieux préfèrent les images moins denses…)…
- en inversible, on cale l'exposition sur les blancs ; en numérique, le blanc sans brillance est à 230, 230, 230.
- en négatif, on cale l'exposition sur les noirs
- et c'est pas en calant les gris qu'on est bon en couleur
Il y a quand même quelques bonnes méthodes pour caler l'exposition :
- la charte Kodak 3 points (je pense que c'est l'as de trèfle…) : un disque noir, un disque gris, un disque blanc. A l'époque de l'argentique, ça servait à caler les banc de reproduction positif-positif (tirage papier d'après tirage)
- le Kodak separation guide (Kodak ne le fait plus mais un autre fabriquant l'a remis à son catalogue, disponible chez Prophot) : il faut prendre le grand (parce que les autres, c'est juste bon pour les scanners), l'ensemble des valeurs de la charte grise doit tenir entre 0 et 255 (la dynamique de la charte n'est pas suffisante, mais au prix où s'est vendu, faut pas rêver)… et la charte couleur permet de vérifier l'expostion sur des plages couleur (quand on est surrex, les plages claires sont délavées)
- les chartes X-rite / Macbeth et consorts : la dynamique des plages est encore plus catastrophique que la Kodak separation guide… une bonne charte doit avoir des plages mesurées individuement et donc avec une feuille de mesure avec la charte (ce qui laisse rêveur quand on voit qu'X-rite demande de s'enregistrer pour donner les mesures de la charte… sans demander le numéro de série de la charte). Bon point, il y a des couleurs bizarres (fluo) qui servent à détecter les porblèmes éventuels de capteur (héritages des chartes de contrôles des filtres des densitomètres).
Enfin, il y a la méthode du pauvre : on mesure sur une peau blanche en sous-exposant d'un diaph… perso, c'est la charte que j'ai toujours sur moi (plus difficile en été quand la peau est bronzée), toujours mate, économique et d'un fiabilité largement suffisante pour un usage général…
A+
Laurent Galmiche